Bubble Factory Collection 2018

Bubble Factory, le salon de coiffure où monsieur paie le même prix que madame

Le salon Bubble Factory, dans le 12e arrondissement de Paris, a fait sa petite révolution pour la nouvelle année : depuis le 1er janvier, les tarifs sont identiques pour les hommes et pour les femmes et instaure une tarification non genré Une idée de l’équipe. Metronews est allé voir.

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Ça a toujours été comme ça. Et personne ne s’est jamais demandé pourquoi. Chez le coiffeur, les femmes paient plus cher que les hommes. Pourquoi ? Mystère. Mais Kath Cala, jeune patronne de Bubble Factory, salon de coiffure du 12e arrondissement de Paris, n’aime pas les mystères. Alors elle a décidé de tout remettre à plat. Depuis le 1er janvier, le barême est non genré, hommes et femmes paient le même tarif. Une petite révolution. De toute façon, Kath, 30 ans, a un immense sourire, de grands yeux, et surtout… du caractère.

« Ce changement de prix, ça fait une bonne année que ça nous trotte dans la tête », explique Kath. » Cette année surtout, on a eu beaucoup de réflexions de clientes, qui nous ont dit : « Le monsieur est arrivé en même temps que moi, on a fait quasiment la même coupe, je paie dix euros de plus que lui. » Ce n’est pas nouveau, mais ça ne devenait plus normal, et on le ressentait de plus en plus. On était gênés… »

« On ne se pose pas la question, en soi, c’est un détail »

En fait, cette différence de prix, Kath ne l’explique pas vraiment. « C’est comme la brosse à dents rose qui coûte plus cher que la bleue… Je pense que ces règles ont été créées il y a des centaines d’années, par les hommes. Aujourd’hui, on essaie juste d’égaliser. On ne veut pas que les femmes aient plus d’avantages. Mais on se dit, doucement, qu’une femme a le droit de payer le même prix que son mari. » Un prix pour tous. Certains salons le pratiquent déjà. Comme la chaîne Tony and Guy, d’inspiration anglo-saxonne, pays où la pratique est répandue. Mais en France, ces salons restent rares. « Quand j’ai ouvert Bubble factory en 2009, je n’ai pas réfléchi, j’ai fait la bêtise de faire comme les concurrents », raconte Kath. « C’est vrai qu’on ne se pose pas vraiment la question : en soi, c’est un détail. Mais à force de changer des petits détails partout, on peut faire changer les choses. »

Alors un soir, elle rassemble son équipe. Et pose le sujet sur la table. « Je leur ai dit : il faut qu’on parle de cette histoire. Qu’est-ce qu’on fait ? » L’an dernier, les hommes payaient 29 euros, les femmes 39. Elle veut instaurer un tarif unique : 35 euros pour tous. Débats dans l’équipe. Certains sont fans, quelques-uns sont plus réticents. Estiment que cette différence, c’est normal, qu’il faut s’y habituer. Que tout ça peut faire fuir la clientèle masculine. Mais Kath tient bon. « On a réussi à convaincre tout le monde », se réjouit-elle. « C’est le moment où jamais pour le faire. Il s’est passé des choses dans ce sens cette année, comme la taxe tampon. Les esprits vont s’ouvrir. » Un compromis est trouvé, trois tarifs sont fixés, unisexe : tarif cheveux courts, cheveux long, et coupe transformation, plus travaillée, à 32, 39 et 45 euros.

De nouvelles clientes

La petite bombe a été lancée en douce sur internet , pendant les fêtes, le salon fermé. Alors forcément, le lundi de rentrée, l’équipe appréhendait un peu. Et en fait, la pilule est bien passée. « Nos hommes sont top, ils nous soutiennent », raconte Kath. « Certains nous donnent 40 euros et nous laissent la monnaie. Ça fait chaud au cœur. » Et Bubble factory n’a pas désempli. « De nouvelles clientes sont venues, elles nous ont découvert par le communiqué, et ça leur a donné envie de venir chez nous », raconte Kath. C’est sûr, cette histoire de prix, ça lui fait de la pub. Ça a même fait un beau buzz sur Facebook : l’annonce a été vue par 40.000 personnes, relayée par des associations féministes. Tant mieux, même si ce n’était pas prévu. « Je n’ai pas fait ça pour faire de l’argent, je ne sais pas si ça va être rentable, car j’ai beaucoup de clientes aux cheveux courts », dit Kath. « On verra à la fin de l’année. »

Justement, devant son miroir, ce vendredi, Louise, cliente depuis mai dernier, se fait rafraîchir sa coupe courte. Et toute cette histoire, elle trouve ça « très amusant » : « Je ne m’étais jamais posé la question des prix », raconte-t-elle. « J’ai toujours pensé que la différence s’expliquait parce qu’il y avait des soins du cheveu, une mise en plis chez les femmes ou parce que c’était plus rapide. Mais maintenant je trouve ça très bien ! «  Assis dans un coin, Gilles, la cinquantaine, est plus mitigé. Il paie maintenant 32 euros. 3 de plus qu’avant. « C’est dans l’air du temps, il faut s’habituer à l’unisexe », dit-il. Il continuera à venir : « Moi, ça ne me dérange pas. On va s’habituer. Mais je pense que ça va toucher des jeunes qui n’ont pas de budget. »

Car le petit changement peut aussi faire perdre des clients.

Kath le sait.

« Ce côté féministe ne passe pas chez tout le monde », reconnaît-elle. « Mais finalement tant pis. On va gagner des clients qui sont vraiment dans le même état d’esprit que nous. On a les clients qui nous ressemblent ! »